Nouvelle proposition de cessez-le-feu : entre espoir diplomatique et fragilité stratégique
Par Alain SAYADA – Analyse géopolitique
La proposition révélée ce jeudi matin par Steve Witkoff, envoyé spécial du président américain Donald Trump, marque une tentative significative de relance des négociations israélo-palestiniennes dans le cadre du conflit à Gaza. Ce nouveau cadre d’accord, transmis dans la nuit à Israël, traduit à la fois la volonté de Washington d’aboutir à un compromis et la complexité persistante des enjeux sur le terrain.
Un cessez-le-feu conditionnel de 60 jours
Au cœur du plan : l’instauration d’un cessez-le-feu de deux mois, destiné à créer une fenêtre pour des négociations sur la fin définitive des hostilités. Contrairement au plan antérieur accepté par Israël, ce texte prévoit la libération initiale de neuf otages vivants, soit un de moins que précédemment, accompagnée de la restitution de la moitié des dépouilles, en deux phases étalées sur une semaine.
Le changement dans le nombre d’otages libérés pourrait paraître mineur, mais il illustre la nature millimétrée des négociations. Chaque détail compte dans un conflit aussi chargé de symboles et de pressions politiques internes.
️ Entre paix conditionnelle et retour possible aux combats
Ce cessez-le-feu ne constitue pas une fin en soi. Il est conditionné à l’avancement des discussions sur la fin de la guerre. Si un accord de principe est atteint durant les 60 jours, les otages restants et les dépouilles seraient libérés. Sinon, Israël se réserve le droit de reprendre les opérations militaires.
Toutefois, une option alternative permettrait de prolonger la trêve en échange de la libération progressive d’autres otages, dans une logique d’ »échange humanitaire contre temps de négociation ».
️ Mesures humanitaires et sécuritaires incluses
Le plan intègre également une reprise de l’aide humanitaire vers Gaza, supervisée par l’ONU et les ONG internationales. Autre volet sensible : la libération de prisonniers palestiniens, selon des mécanismes déjà en place dans les précédents accords.
Sur le terrain, l’armée israélienne (Tsahal) se retirerait de certaines positions : maintien sur l’axe de Philadelphie, stratégique pour le contrôle des tunnels, mais retrait de l’axe Netzarim, que Netanyahou avait récemment rebaptisé « Philadelphie 2 », en signal clair de ses ambitions sécuritaires.
Ligne américaine : pression et pragmatisme
Witkoff, proche de Donald Trump et figure influente du monde des affaires, a exprimé son optimisme prudent mercredi soir. Il qualifie la proposition de « modulable » et affirme que les États-Unis sont prêts à « jouer sur les mots » pour faire passer un accord.
Selon des sources proches du dossier, Washington exerce une pression forte sur Israël pour qu’il accepte des garanties solides sur la fin de la guerre, exigence constante du Hamas. Cette posture marque une inflection stratégique notable dans l’approche américaine, combinant soutien à Israël et souci d’une désescalade régionale durable.
⚖️ Une équation toujours incertaine
Ce plan illustre l’équilibre délicat que tentent de trouver les médiateurs : concilier les exigences sécuritaires d’Israël, la pression humanitaire croissante à Gaza, et les demandes politiques du Hamas. S’il ouvre une voie possible vers la désescalade, il repose sur des hypothèses fragiles et sur la bonne volonté fluctuante des acteurs.
Dans ce contexte, la proposition de Witkoff s’apparente à une fenêtre d’opportunité étroite : elle peut ouvrir la voie à une trêve durable, mais pourrait tout aussi bien échouer si les lignes rouges de chaque camp demeurent infranchissables.
Alain SAYADA