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Casse tête pour identifier la provenance du « trésor nazi » (PAPIER D’ANGLE) Par Frédéric BICHON

BERLIN, 06 nov 2013 (AFP) – Collectionneurs juifs spoliés, musées allemands
purgés par les nazis… Déterminer l’origine des plus de 1.400 oeuvres d’art
découvertes à Munich est un travail de titan pour les autorités allemandes
critiquées pour leur apparente nonchalance.
« Les fonctionnaires qui s’occupent de l’affaire jouent un rôle bizarre, ils
gardaient le secret » depuis plus d’an an, écrivait mercredi le quotidien
General Anzeiger de Bonn.
« La timidité des efforts jusqu’à présent est sidérante », renchérissait le
Münchner Merkur de Munich, la capitale bavaroise où furent retrouvées par
hasard en février 2012, dans un appartement jonché d’ordures, 1.406 oeuvres
dont des tableaux inconnus de Marc Chagall ou Otto Dix.
Ces dessins, aquarelles, lithographies ou peintures ont été trouvés dans
l’appartement de Cornelius Gurlitt, octogénaire, fils d’un grand
collectionneur d’art considéré comme juif, par sa grand-mère, qui a collaboré
avec les nazis en écoulant à l’étranger des oeuvres volées aux juifs ou
décrochées des musées.
« Le gouvernement ne s’est pas couvert de gloire », commentait le
Rhein-Neckar-Zeitung.
« S’il est exact qu’une seule experte travaille sur la question compliquée
des restitutions (..) on peut douter que les fonctionnaires aient mesuré le
sérieux de la situation », ajoutait le Merkur.
Le porte-parole du gouvernement Steffen Seibert, qui assurait lundi que des
experts aidaient « depuis des mois » le parquet de la petite ville d’Augsbourg,
en charge de l’affaire, a précisé mercredi que des renforts étaient « à
l’étude ».
Car personne ne prétend que la solution soit simple.
En 1938 les nazis ont fait passer une loi pour purger les musées de l' »Art
dégénéré », oeuvres parfois, mais pas toujours, réalisées par des artistes
juifs. Tout ce qui n’était pas la représentation classique du corps humain
était suspect aux yeux des autorités.
« En tant que propriétaire, le Reich allemand pouvait décider librement de
se séparer de certaines oeuvres, pour quelque raison que ce soit », expliquait
mardi dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung Imke Gielen, avocate spécialisée
dans les affaires de restitution.
Si Hildebrandt Gurlitt a à cette occasion acheté des tableaux, même à vil
prix, son héritier Cornelius en serait le légitime propriétaire. D’ailleurs,
après la guerre, les Alliés et le législateur allemand ont décidé de ne pas
abolir la loi de 1938, pour donner des assurances au marché de l’art.
Les Américains, qui occupaient le sud-ouest de l’Allemagne ont saisi en
1945 la collection de ce marchand en cheville avec le Troisième Reich, selon
des documents mis en ligne mercredi par le Holocaust Restitution Project, mais
elle lui fut restituée en 1950.
La question des Juifs spoliés est sensiblement plus compliquée. Fin 1998
fut conclu l' »Accord de Washington » par lequel les Etats et les grands musées
s’engageaient à faire le maximum pour rendre à leur propriétaire ou aux ayants
droit les toiles qui pendraient à leurs cimaises.
Mais, outre qu’il ne s’agit que d’un engagement volontaire, il ne concerne
pas les particuliers.
« S’il est prouvé que Cornelius Gurlitt a hérité (de ces oeuvres), il en est
l’héritier en tant que personne privée », a expliqué à l’AFP Vanessa-Maria
Voigt, spécialiste de la question des restitutions, attachée au Stadtmuseum de
Munich. « Il peut alors conserver les peintures. Il y a eu des restitutions de
la part de particuliers, mais sur une base volontaire ».
« Les héritiers, dont les familles ont été spoliées à l’époque nazie,
peuvent tenter de faire valoir leurs droits », nuançait Me Imke Gielen. L’issue
d’une telle procédure est « variable ».
Mardi, le procureur d’Augsbourg Reinhard Nemetz a lancé un appel durant sa
conférence de presse pour que « qui estime avoir perdu des oeuvres d’art durant
le régime nazi s’adresse au parquet ».
Ces incertitudes expliquent la grande prudence de l’Art Recovery
Commission, groupe créé par le milliardaire américain Ronald Lauder, président
du Congrès juif mondial, pour traquer les oeuvres volées durant la Shoah.
Son conseiller juridique Charles Goldstein a dit au New York Times de
mercredi ses doutes sérieux quant aux possibles restitutions. « Il faut arriver
à déterminer si (les oeuvres) ont été volées ou prises dans les musées »,
souligne-t-il en montrant de l’indulgence pour les autorités allemandes:
« elles se retrouvent avec une patate chaude ».
fjb-ran/aro/via

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