La République en alerte : face à la montée des discours ambigus, défendons les valeurs de la France Par Alain Sayada
Paris 17h20
Depuis plusieurs mois, le débat public en France est parasité par une radicalisation inquiétante du discours sur le conflit israélo-palestinien. Ce qui devrait nourrir une réflexion humaniste et équilibrée devient, trop souvent, un terrain de passion et de haine. Au lieu d’apaiser, certains leaders politiques attisent, au risque de fracturer encore davantage une société déjà fragilisée.
Une critique qui dérape
La critique de la politique d’un État étranger, y compris Israël, est légitime dans une démocratie. Mais lorsque cette critique devient obsessionnelle, systématique, univoque — comme celle qu’expriment aujourd’hui Jean-Luc Mélenchon et une partie de ses proches à La France Insoumise — elle cesse d’être un simple désaccord. Elle devient un marqueur idéologique. Elle vire à la stigmatisation.
Le silence sur les crimes du Hamas, sur le pogrom du 7 octobre, sur les appels au meurtre et à l’extermination dans certaines manifestations, est tout aussi assourdissant qu’inquiétant. Que penser également de la proposition de François Ruffin d’instaurer un embargo contre Israël ? Une idée irréaliste et dangereuse, qui renforce un climat délétère.
Lorsque ces discours s’accompagnent d’un rejet caricatural d’Israël, souvent au prix d’approximations historiques ou morales, on glisse vers une confusion délibérée, voire une hostilité ciblée. Ce n’est plus un débat, c’est une stratégie politique.
Cynisme électoral et clientélisme
On ne peut que s’alarmer de voir certains élus, y compris locaux, reprendre les éléments de langage les plus radicaux dans une logique manifestement électoraliste. Le cas de la maire écologiste de Strasbourg, Jeanne Barseghian, en est une illustration troublante. En recevant récemment des représentants palestiniens et en acceptant de poser à leurs côtés avec une carte effaçant purement et simplement Israël — une carte représentant une « Palestine » allant de la mer Méditerranée au Jourdain — elle a franchi une ligne symbolique lourde de conséquences.
Ce visuel, qui nie l’existence même de l’État d’Israël, aurait dû provoquer au minimum un rappel des principes de droit international ou un geste de recul. Or, il n’en fut rien. Aucune réaction. Aucune mise au point. Ce silence vaut approbation. À moins de croire à une naïveté politique inconcevable à ce niveau de responsabilité, il faut y voir un alignement idéologique délibéré.
Mais de quel côté se situe-t-on quand on cautionne, même implicitement, une vision qui nie le droit à l’existence d’un peuple et d’un État membre de l’ONU ? Il ne s’agit plus ici de soutenir la cause palestinienne — une démarche légitime lorsqu’elle se fonde sur la justice et la paix — mais bien d’exploiter un conflit international pour flatter certains segments électoraux. Cela n’a plus rien à voir avec la compassion ou le droit. C’est un pur calcul politique. Et c’est indigne d’un élu de la République.
Le Hamas n’est pas un mouvement de libération. C’est une organisation terroriste, qui porte en elle la haine des Juifs et le rejet de toute solution pacifique. Le soutenir directement ou indirectement, même par silence ou relativisme, c’est trahir nos valeurs les plus fondamentales.
Antisémitisme : un mal qui revient
Nous devons cesser de tourner autour du pot. Oui, l’antisémitisme remonte dangereusement. Dans les écoles, les universités, les médias, sur les réseaux sociaux. Sous couvert « d’antisionisme », certains véhiculent un discours haineux, souvent sans en assumer les conséquences. Ce glissement est inacceptable.
L’État, lui aussi, doit être clair. Emmanuel Macron, tout en condamnant officiellement l’antisémitisme, a parfois donné le sentiment de ménager toutes les parties. L’absence du président lors de la grande marche contre l’antisémitisme, les tensions diplomatiques prolongées avec le gouvernement israélien, ou encore les ambiguïtés du ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, laissent une impression de flottement.
Et que dire de ce rapport sur les Frères musulmans, resté dix mois dans un tiroir de l’Élysée avant d’être rendu public ? Pourquoi ce silence ? Pourquoi cette réticence à nommer les choses ? Le Hamas est, rappelons-le, la branche palestinienne des Frères musulmans. On ne peut prétendre défendre la République tout en ménageant ceux qui s’en prennent à ses fondements.
L’heure du sursaut
La France fut jadis un modèle de raison, de lumière et de tolérance. Aujourd’hui, ces valeurs sont menacées par les extrêmes, par les replis identitaires, par le clientélisme politique. Il est temps de dire non.
Non à la banalisation de l’antisémitisme.
Non à l’instrumentalisation du conflit israélo-palestinien à des fins politiques.
Non à ceux qui, sous couvert de vertu, affaiblissent l’universalisme républicain.
Défendre la laïcité, la liberté d’expression, le respect de l’autre et la lutte contre toutes les formes de racisme — y compris l’antisémitisme — ce n’est pas être réactionnaire. C’est être fidèle à ce que la France a de plus précieux.
La République n’est pas une opinion parmi d’autres. Elle est notre bien commun. Et elle mérite d’être défendue avec clarté, fermeté et honneur.
Alain SAYADA
Israel Actualités